Interview de Cécile Béroni,
SEO Manager

Pouvez-vous nous parler de votre métier ?

Mon défi est d’identifier et de mettre en œuvre des projets qui contribuent à la croissance du trafic naturel sur un site. Il s'agit donc d'articuler des compétences, des moyens humains et matériels permettant de réaliser cet objectif. En tant que manager SEO (Search Engine Optimization), je vais avoir une équipe composée de personnes spécialisées dans le contenu, de personnes spécialisées en gestion de projet marketing et de personnes spécialisées en IT, mais dédiées à mes projets. Quand je veux travailler sur webperf et la modification de templating de page, j'intègre aussi les équipes e-merchandising, UX ou encore l’IT qui permettent d’apporter une vision beaucoup plus riche à mon projet, et beaucoup moins SEO centré. C’est cette collaboration avec des personnes qui ont des métiers et des compétences très différents qui va nous permettre de répondre aux opportunités de croissance du site sur lequel nous évoluons. C’est ce que j’apprécie beaucoup avec le SEO : c’est comme une mini-cellule entrepreneuriale au sein d’une entreprise. Cela permet de travailler avec de nombreux pôles qui ont des formations et des façons de fonctionner totalement différentes. C’est super intéressant !

Comment êtes-vous devenu SEO Manager

J’ai un parcours plutôt généraliste de type commerce. J’ai fait un bac ES que j’ai poursuivi avec un DUT et une licence pro. L’objectif pour moi était de ne pas payer mes études. La licence pro m’a permis de rentrer en école de commerce directement en Master en apprentissage profitant ainsi de deux années d’école de commerce gratuites et de trois années universitaires. Cela m’a surtout permis de bénéficier de l’alternance depuis la licence. Par rapport à ces études très génériques, j’ai alors pu développer une expertise opérationnelle et métier et c’est là que j’ai acquis mes compétences en SEO. J’ai fait une alternance dans une agence à taille humaine, d’une dizaine de personnes. Elles m’ont formée au SEO et m’ont appris toutes les bases de ce métier. Ma formation m’a, en revanche, été utile dans la mécanique de gestion de projet, de gestion de budget ou dans le management et la gestion d’équipe. C’est donc un métier que je conseille d’apprendre sur le terrain avec des cas d’usage, des problématiques et des challenges bien définis afin de développer ses idées et comprendre pourquoi ça marche.

Quelles sont vos missions principales ?

Il n’y a pas de journée type : chaque journée est composée de travail avec les différentes équipes sur les différents projets IT, UX... J’articule tout cela en fonction des dashboards et du planning de direction et de ma Roadmap projet (planning). En tant que manager, il y a, bien entendu, des journées dédiées au management, à la stratégie, à la communication, à la politique. Cela consiste à diffuser la stratégie SEO, communiquer, échanger les idées, animer des réflexions autour de tes projets avec les différentes parties prenantes… Il faut aussi motiver son équipe et les accompagner dans leurs projets, faire le bilan des avancements, mettre en place une stratégie d’enjeux de croissance, une roadmap...
Pour moi, être SEO manager, c’est 20 % de stratégie de pôle, 20% de management et 60% d’activité opérationnelle sur de la gestion de projet. Cette dernière mission comporte plusieurs étapes : l’analyse projet, sa présentation, le montage du cahier des charges et de ses spécifications techniques en passant par le cahier de recettes pour tester le projet et donner le storytelling aux développeurs pour qu’ils puissent monter les features (ndl : fonctionnalités). Une fois le projet lancé, l’état d’avancement et les résultats du projet sont communiqués régulièrement permettant de maintenir et d’optimiser la fonctionnalité dans le temps. Ce poste nécessite aussi de rester toujours à la page donc de faire de la veille active, non passive. Il faut donc participer à de nombreux événements pour partager et s’enrichir, réserver du temps pour rencontrer les nouveaux acteurs du SEO et les fournisseurs de solution pour nous permettre de challenger nos idées. Il faut vraiment être dans l'interaction, le partage et l’échange.

Quelles sont les qualités que vous mobilisez pour ce poste ?

Il faut être passionné, c’est primordial. Pour moi, on ne fait pas du SEO comme on peut faire du SEA (Search Engine Advertising). Il faut dépasser les limites de nos propres compétences et accepter de ne pas avoir la maîtrise de tous les éléments. L’algorithme du moteur de recherche est une source de curiosité qui représente un fantasme technologique. Il est très capricieux, car il n’évolue pas toujours dans le bon sens. La passion est donc très importante. Il faut aussi être très bon communicant, le SEO n’étant pas une science exacte. Vous allez alors devoir tenir un discours devant une direction et des équipes pour les fédérer. C’est compliqué pour une direction d’avoir la maîtrise de cette activité, car en SEO on n’est jamais à l’abri d’une mise à jour Google, d’une montée concurrentielle… Ce n’est pas parce qu’on est SEO compliant que tout est gagné. Je parle aussi beaucoup de bon sens : faire les choses parce que cela nous semble logique, parce que cela correspond à un objectif business et que c’est dans le sens de l’expérience utilisateur. Une autre qualité : la curiosité. Il faut s’intéresser à son métier et à tout ce que les autres pôles font, être sur tous les fronts et savoir ce qui se passe sur toutes les roadmaps. Je conclurais par compétent pour avoir les bases du métier, piloter son projet, fédérer et manager une équipe.

Si vous deviez définir votre métier en un mot ?

Be smart ou futé. Il faut être futé ou un peu filou dans ce métier.

Chaque métier a son jargon, quel est le vôtre ?

Mon mot d’ordre : “faire ses KPI (ndl : Key Performance Indicator, indicateurs de performance)”, “KPI à fond”. C’est quelque chose que je rabâche à mes équipes, car après les avoir fédérées et avoir obtenu la validation de la direction, le plus important ce n’est pas forcément de dire « merci », mais « merci, vous avez participé à la réussite de ce projet et je vous le prouve avec les KPI ». Cela permet de vraiment montrer les résultats obtenus en termes de performance et cela participe à l’objectif que nous avons tous en commun : l’objectif business de l’entreprise. Je parle souvent d’”hypermesurabilité”. En fait, dans le digital, les gens se perdent beaucoup, car tout est mesurable donc ils veulent tout savoir : est-ce que c’est cet élément qui a été plus vu qu’un autre, sur ce canal-là, combien de temps les gens ont passé sur le site... Être” Data driven” oui ! Mais dans une juste mesure. Donc je vais parler de “bon sens du dashboard”, avoir un “dashboard project centrics” et ne pas présenter des chiffres juste pour les chiffres. Les “Roadmap” sont ainsi crédibilisées par des études claires et précises et la présentation des “ Business review” est convaincante.

Si vous ne deviez donner qu’un seul conseil pour réussir ?

Vivre ce métier comme une expérience entrepreneuriale. Un entrepreneur va devoir s’intéresser à la compta et au juridique, malgré son manque d’expérience, mais il va devoir apprendre et composer avec diverses expertises. C’est la même chose pour le SEO. Même si on ne maîtrise pas tout, il faut s’intéresser à tout et comprendre pour piloter et mener à bien ses projets. J’insisterais aussi sur l’apprentissage sur le terrain, le fait d’être passionné, futé, d’échanger un maximum, de participer à des workshops et de ne pas prendre les choses pour acquises. C’est un métier que j’adore, car c’est ultra stimulant !

Une anecdote à nous raconter ?

Lors d’une migration de site, beaucoup d’équipes sont impliquées et les risques sont importants par rapport à la qualité du contenu qui va être présentée à nos utilisateurs. On ne maîtrise pas tout. Un jour, j’ai piloté un projet de migration, faute d’autre volontaire et consciente des enjeux de ce projet pour mon pôle. Nous sommes arrivés dans les locaux en pleine nuit pour faire cette migration afin qu’aucun utilisateur ne s’en aperçoive et que l’on puisse tester les features du projet. Nous avons travaillé de 2h du matin à 3/4h. Ce projet nocturne avait quelque chose de très marrant. Notre directeur était là très concentré à sa mission de désactiver l’alarme sous peine de réveiller tout le comité exécutif à 2h du matin si elle se déclenchait. L’impensable arriva, l’alarme sonna quelques minutes pour le plus grand bonheur du quartier et des Directeurs alertés en pleine nuit. Mais, au-delà de cette petite anecdote, c’est surtout l’expérience de ce travail nocturne qui m’a marqué. Les projets digitaux peuvent donc être des environnements de travail assez surprenants. C’est assez rigolo.